À Limoges et dans ses environs, l’absence de passages piétons sur de nombreux carrefours met en danger les piétons et complique leurs déplacements. Nous avons recensé au moins 1 000 passages piétons manquants, et demandons aux collectivités de se saisir du problème et de donner priorité pour les aménagements piétons.

Une problématique de sécurité publique

Les statistiques de la sécurité routière montrent que les piétons sont les usagers les plus vulnérables de l’espace public. Selon l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR) :

• 483 piétons ont perdu la vie en France en 2024, soit environ 15 % de la mortalité routière.
• Près de 86 % des accidents de piétons ont lieu lors de leur traversée de rue.  Dans 60% des accidents, le conducteur n’a pas ralenti donc probablement pas vu le piéton. La visibilité lors de la traversées est donc un élément essentiel. (source)
• Les personnes âgées et les enfants de moins de 15 ans sont les catégories de piétons les plus touchées.

À Limoges, plusieurs drames récents nous rappellent le danger de traverser la rue.

• En 2023, une piétonne meurt percutée avenue Martial Valin, là où débouche une allée piétonne, alors que le passage piéton le plus proche est à 200 m.
• En 2024, 3 piétons dont 2 jeunes enfants sont percutés par un automobiliste alors qu’ils traversaient vraisemblablement l’avenue Montjovis sur la branche du carrefour non équipée de passage piéton :

Cependant, l’absence de passages piétons n’est pas qu’un problème de sécurité. Cela décourage la marche, qui est pourtant un mode de déplacement essentiel pour limiter l’usage de la voiture et réduire les émissions polluantes en ville.

Ce que dit la loi

Le Code de la route impose aux piétons d’utiliser les passages piétons lorsqu’ils se trouvent à moins de 50 mètres. Mais, paradoxalement, il ne contraint pas les collectivités à les aménager systématiquement, ce qui crée des situations de danger.
L’article R412-37 stipule que, sans passage dédié, les piétons doivent traverser en prolongement du trottoir, une solution souvent insatisfaisante en termes de sécurité et de confort.

De plus, pour améliorer la visibilité des piétons, la loi LOM impose aux collectivités de supprimer les stationnements de véhicules motorisés situés 5 m en amont des passages piétons. Tous les passages piétons doivent être mis en conformité avant le 1er janvier 2026. Cette loi va dans le bon sens, mais encore faut-il qu’il y ait un passage piéton là où on veut traverser…

Les recommandations techniques

Le Cerema, référence en matière d’aménagement urbain, recommande une approche adaptée aux différents types de rues :

• Zones classiques (50 km/h) : Les passages piétons doivent être systématiquement implantés aux carrefours, et parfois entre deux intersections si la distance est importante ou si les activités générées entraînent de nombreuses traversées.
• Zones 30 et zones de rencontre : Si le marquage des passages n’est pas obligatoire, des traversées suggérées (via des matériaux spécifiques ou des couleurs) peuvent rassurer les usagers les plus vulnérables, comme les enfants et les personnes âgées.

Cependant, nous pensons que le marquage d’un passage piéton reste essentiel dans de nombreuses situations même en zone 30 :

• Il dégage la vue, ce qui permet aux conducteurs d’identifier rapidement les traversées.
• Il garantit des traversées accessibles aux personnes à mobilité réduite (PMR) et aux poussettes grâce aux bordures abaissées et à un marquage clair.
• Il sécurise l’ensemble des piétons, y compris ceux qui ne peuvent pas anticiper les trajectoires des véhicules.
• Il encourage la marche en raccourcissant les traversées de carrefours.

Un autre point très important est que les piétons vont toujours au plus court, quitte à se mettre en danger. Ainsi, le Cerema recommande d’aménager des passages piétons à toutes les branches des carrefours, dans le prolongement naturel du cheminement :

Pour aller plus loin, la Métropole de Nantes a réalisé un tableau d’aide à la décision qui nous parait être un bon guide.

Une carte collaborative des passages piétons manquants

Pour illustrer l’ampleur des besoins à Limoges, nous avons lancé une carte collaborative qui recense les branches de carrefours dépourvus de passages piétons. Cet outil participatif a permis de recenser déjà plus de 1 000 passages manquants à Limoges et dans les communes de 1ère couronne.

L’objectif de cette carte n’est pas de planifier directement les aménagements, ni de faire ce recensement de manière précise et exhaustive, mais de montrer aux décideurs locaux que ce problème est systémique et massif. Chaque point ajouté illustre une traversée non conforme, parfois empruntée quotidiennement par des centaines de piétons.

Quelques exemples critiques

Rue Pétiniaud Beaupeyrat / Av. Ernest Ruben

Pour traverser 8 m de chaussée à cet endroit en empruntant des passages piétons, il faut soit un détour de 140 m en direction de Renoir, dont 58 m de passage piéton. Si on veut des abaissés de trottoirs à chaque fois, il faut aller en direction du centre-ville pour un détour de 200 m…

Boulevards des Arcades et Boulevard Vanteaux

Un passage piéton manquant autour du boulevards, c’est mettre 3 à 5 minutes pour traverser toutes les autres branches. Pas de quoi donner envie de marcher… Les passages les plus proches sur la même branche sont à plus de 250 m dans ces deux exemples !

Avenue Martin Luther King (quartier CHU)

Ici, de très nombreux étudiants de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines traversent chaque jour ce qui ressemble à une autoroute pour rejoindre l’arrêt de bus le plus proche. C’est évidemment très dangereux. Nous avons déjà fait remonter ce problème, mais rien n’est encore fait.

Boulevard Gambetta

D’un côté le centre ville piéton, de l’autre la BFM, son parking, la faculté de Droit. Ce carrefour accueille de très nombreux piétons. Et pourtant, pour traverser le boulevard Gambetta, il faut attendre plusieurs minutes et cycles de feux. Incompréhensible !

Pourquoi ces passages piétons manquent-ils ?

Quand nous posons cette question, Limoges Métropole nous répond qu’historiquement, des arbitrages ont facilité l’écoulement du trafic automobile (notamment en tourne-à-gauche) au détriment des piétons.

Parfois, des contraintes de visibilité en virage, ou de présence d’entrée charretière font arbitrer en défaveur des passages piétons.

Mais encore bien souvent, c’est la suppression potentielle de stationnements sur la voie publique qui guide ce choix.

Par exemple, sur cette rue récemment rénovée, le passage piéton existant a disparu. Il y a une entrée charretière, mais il aurait pu être décalé de quelques mètres. Cela aurait probablement supprimé 2 ou 3 places. En attendant, les traces de pas des piétons montrent qu’ils traversent toujours ici, mais sans marquage clair ni abaissé de trottoir.

Pour résumer, nous pensons que la priorité devrait toujours être donnée aux usagers les plus vulnérables que sont les piétons.

Notre demande aux collectivités

L’aménagement de passages piétons là où ils manquent est essentiel pour améliorer la sécurité et encourager des mobilités actives. Avec des infrastructures adaptées, nous pouvons réduire les risques d’accidents, rendre la marche plus agréable et limiter l’usage de la voiture en ville.

Ainsi, pour résoudre cette problématique, nous demandons à Limoges Métropole et aux maires des communes de se saisir du problème et de lancer un plan massif d’aménagement des passages piétons sur toutes les branches des carrefours en zone 30 et 50, sauf dans des cas spécifiques de danger avéré (mauvaise visibilité).

Ensemble, citoyens et élus, mobilisons-nous pour que Limoges Métropole devienne accessible à tous les piétons !